Mégalithes et légendes

MÉGALITHES ET LÉGENDES 

Sarthe, terre des mégalithes, à l’instar de l’antique Bretagne !
Qui l’eut cru ?

Les dits mégalithes, pour la presque totalité d’entre eux, localisés à l’est d’une ligne imaginaire joignant La Flèche à La Ferté-Bernard, donc à l’opposé géographique de notre prestigieuse province voisine !
Qui l’eût dit ?

Une quinzaine de dolmens, dont l’allée couverte du Coulombier à Aubigné-Racan ! Une bonne quinzaine de menhirs dont ceux de la Lande des Soucis, qui sont des vestiges de ce que Louis Maulny appelait « Le petit Carnac sarthois » ! Qui oserait affirmer que, chez nous, tout n’est que banalité !

Photo les pierres de mere et la fille a saint jean de la motte copie

Si les pierres, levées ou couchées, toute d’une seule voix pouvait parler, que de choses elles pourraient nous dire ! Elles nous diraient comment certaines d’entre elles survécurent à d’aveugles mutilations dictées par le fanatisme religieux tout autant que par l’appât du gain ou la simple bêtise.
- Torcé-en-Vallée - Pierre Renouard nous rapporte les misères subies par
le dolmen de Torcé-en-Vallée que « les Dames de la Visitation du Mans firent détruire [...] pour la réparation de l’une de leurs fermes, les blocs qui étayaient cet autel ». Misères qui se renouvelèrent vers 1801 au point que l’administration du préfet Auvray dut intervenir « pour arrêter le massacre », le propriétaire du champ ayant commencé à briser le monument.
- Requeil - Plus près de nous, en 1953,
le dolmen de la Bresle à Requeil fut rasé par son propriétaire, un agriculteur, désireux de nettoyer le terrain, l’historien Paul Cordonnier-Détrie avait pourtant signalé la présence d’un polissoir à l’intérieur, mais le site n’était pas classé.
- Saint-Germain d'Arcé - Le dolmen d’Amnon, à Saint-Germain-d’Arcé pourrait nous conter son étonnante aventure. En 1811, Renouard signalait déjà "une pierre druidique au milieu d’un grand nombre de blocs" ; quarante ans plus tard, Pesche apportait quelques précisions décrivant "un dolmen que la main de l’homme a détruit en partie, renversant la table ou pierre supposée, laquelle reste gisante près de pierres verticales sur laquelle elle portait". Puis il sombra dans l’oubli. En 1971, un habitant du lieu, Gérard Pagès, le sauva d’une destruction totale alors que les services de l’Équipement intervenaient au bulldozer pour élargir un chemin rural. Les dégâts furent néanmoins considérables : l’une des tables était cassée et déplacée et la dalle du chevet renversée et brisée en trois fragments ; il est vrai qu’aux trois quarts enterré et envahi de ronces, son abri avait été, depuis longtemps transformé en dépotoir. Les services de la direction des Antiquités préhistoriques prévenus par le sauveteur intervinrent immédiatement et un dossier de classement au titre des Monuments historiques fut établi dès août 1971. Mais, six mois plus tard, une nouvelle alerte manqua de tout faire échouer. À la suite de l’abattage des arbres d’une allée proche, les souches et restes de branchages avaient été entassés autour et au-dessus du malheureux dolmen, bientôt rejoints par d’énormes blocs de pierre arrachés dans les environs par un riverain. Les services compétents furent à nouveau sollicités ; une équipe de télévision fut dépêchée sur place. Le sauvetage et la restauration commencèrent le 3 juillet 1972. Pour la première fois en Sarthe, des fouilles portant sur un monument mégalithique malheureusement très abîmé étaient entreprises. Fut ainsi sauvé ce qui pouvait encore l’être et, du même coup, confirmée la vocation funéraire du site datant de l’extrême fin du néolithique.
- Duneau -
Si les pierres pouvaient parler, celles de l’ensemble constitué du menhir de Pierrefiche, troué en sa partie supérieur, implanté sur le plateau de Duneau et du dolmen de la Pierre Couverte, trois cents mètres plus bas, au fond de la vallée, nous annonceraient peut-être quelles proviennent des gros amas de roches des champs du Rocher, tout proches. 
- Vouvray-sur-Huisne -
Si les pierres pouvaient parler, elles nous confieraient aussi leurs petits secretsLe dolmen de vouvray sur huisne 1 ; le dolmen de Vouvray-sur-Huisne nous chuchoterait pourquoi il porte, sur la face interne de son pilier nord des traces qui correspPhoto du polissoir du dolmen de vouvray sur huisneondent aux rainures d’un polissoir.

 

 

 

 

 

 

 

 

- Lamnay - Si les pierres pouvaient parler, elles nous révèleraient peut-être les lieux où se cachent certaines de leurs semblables, enfouies sous les tas de terre, réfugiées sous la protection de la végétation, tel ce mystérieux menhir de Lamnay dont parlent les anciens du village, mais qu’ils ne sont jamais parvenus à trouver. Si les pierres pouvaient parler, elles nous diraient enfin, la vérité sur les cortèges de légendes qui les entourent.
- Dissé-sous-le-Lude -
Le dolmen de Laurière, et deux menhirs proches dont un disparu, tous trois à Dissé-sous-le-Lude, nous expliqueraient pourquoi ils se réunissaient tous les trente-trois ans pour former un seul fantôme, visible seulement des hommes nés un dimanche ; ce fantôme poussait des cris affreux attendant un hercule capable de hisser les trois blocs les uns sur les autres pour le délivrer du sort dont il était victime.
- Maupertuis -
Nous saurions pourquoi le dolmen de Maupertuis, original par son architecture circulaire, dit l’Aître aux fées, était le rendez-vous des fées lorsque minuit sonnait au village de l’Homme. Pendant le carême, elles se livraient à un sabbat effréné au cours duquel les hommes qu’elles avaient capturés étaient torturés à mort et disparaissaient.
- Ruillé-en-Champagne - Nous pourrions enfin entendre ce qu’échangeaient celles de Ruillé-en-Champagne lorsqu’elles tenaient conseil au sommet de Roche, à deux pas de
la Chaire à Chicat, un gros bloc rocheux en forme de chaise.
- Parigné-le-Pôlin -
La pierre couverte de Bruon, à Parigné- le-Pôlin, nous raconterait comment saint Martin, passant par la lande de Bruon, avait tué un énorme serpent qui logeait là, ravageant et infestant les alentours par sa mauvaise odeur. Elle nous dévoilerait les raisons pour lesquelles à pareil jour, tous les trente ans, elle paraît en feu à minuit. pas très loin, le même saint Martin qui, de son bâton avait fait jaillir une source miraculeuse, n’aurait-il pas pétrifié les quelques deux mille habitants incrédules, les transformant en autant de menhirs fichés dans la lande des soucis déjà évoquée. Seules les pierres de Mère et Fille pourraient nous le confirmer et nous expliquer pourquoi les pierres alignées restantes paraissent indiquer la position du soleil levant au solstice d’été.
- Nogent-le-Bernard - Comme le ferait le
dolmen de Courtevrais, à Nogent-le-Bernard, entouré de nombreux de nombreux blocs de grès dispersés dans les champs, dont on dit qu’il y avait là un cimetière gaulois, le chef sous la table et les soldats tout autour.
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La Flèche - Le menhir de la Roche Voyer, apprécié par les pèlerins qui grattaient sa surface pour en faire un breuvage contre l’anémie, à absorber trois fois pendant qu’on sonnait l’Angélus, en murmurant entre chaque gorgée « Gaspard, Melchior, Balthazar », livrerait le secret de sa recette.
- Le Mans -
Nous pourrions dialoguer enfin avec le menhir qui se blottit contre la cathédrale du Mans pour enfin lui poser toutes les questions qui intriguent les vieux Manceaux. Pour qu’elle raison fut-il sauvé alors que la Pierre au Lait, toute proche, n’échappa pas au désastre ? Est-t-il exact qu’une croix aurait été scellée à son sommet ? Qu’en est-il de la vertu magique que la tradition prête à cet énigmatique petit trou creusé à son flanc et dans lequel il faut placer son pouce ?

Quel intérêt, direz-vous, aurait-t-il à déflorer toutes les légendes ? L’essentiel n’est-il pas qu’elles aient dans le passé, protégé les mégalithes contre les destructions ? Ces témoins majeurs de notre patrimoine sont maintenant, pour la plupart, inscrits ou classés au titre des Monuments historiques, donc sauvés ! Oui… enfin pas toujours, car les victoires contre la bêtise ne sont jamais définitives…
En voici la preuve :
Au cœur du bois de Loudon, sur la commune de Parigné-l’Évêque, se dressait jadis
la Pierre Bergère, fort connue dans la région. Ne disait-on pas qu’à minuit, la nuit de Noël coïncidant avec le solstice, elle tournait sur elle-même ! Le folkloriste Roger Verdier avait rapporté cette histoire dans un épisode particulièrement savoureux de son roman picaresque Prosper Béroux, roi des Loudonniaux. À deux reprises, en 2008 puis en 2015, la Pierre Bergère fut endommagée par d’épais grumiers ; ne restent aujourd’hui de la mythique pierre qui tourne, jonchant le sol, que trois ou quatre cailloux… muets pour l’éternité.

Date de dernière mise à jour : 14/02/2024