Bérengère de Navare

BÉRENGÈRE DE NAVARE

(Vers 1170-1230)

La reine solitaire de l’Épau

En cet été de l’an 1230, Bérengère s’est fait conduire sur les terres de l’Espal  où elle a décidé de faire construire un monastère. C’est en ce lieu qu’elle reposera pour l’éternité. Pensive, elle chemine, le long de l’Huisne qui borde son domaine. Le regard figé sur la rivière, elle laisse flotter ses pensées. Elle rêve. Dans les eaux sombres qu’entraine le courant, s’esquissent des formes, qui deviennent des scènes… des scènes de sa vie, dont elle sent poindre le terme. Elle y voit d’abord une fillette, rieuse et insouciante, qui s’ébat auprès de son père, Sanchez VI, roi de Navarre. Un reflet, né d’un fugace rai de soleil, dans le ciel manceau, fait naître une nouvelle image, celle d’une femme jeune et tendre.

C’est elle, Bérengère…Elle vogue sur la Méditerranée…aborde les côtes de Sicile et découvre, celui qui lui est promis : Richard Cœur-de-Lion, le fougueux roi d’Angleterre. Après mille péripéties, leur union est célébrée dans le château de Limassol, à Chypre. Les mariés, radieux, resplendissent de bonheur.

 Mais, bientôt, le passage d’un nuage, efface la scène de félicité. Le bel époux se dérobe, remplacé par l’homme de guerre impitoyable qui, en Terre Sainte, lutte contre les infidèles. Emporté par le courant, Richard s’évanouit à son tour. Il cède la place à Richard l’otage, arrêté en revenant de la croisade et détenu par l’Empereur d’Occident Henri le cruel. Puis, du cœur de l’onde, jaillit l’éclat des armes.

À nouveau sur un champ de bataille, mais en terre française cette fois-ci, son roi, apparaît plus hardi que jamais. Son regard brille dans la mêlée. Soudain, la face aimée se couvre de sang. Puis …plus rien.

  La morne solitude de Bérengère, dame douairière du Mans, qui fut reine d’Angleterre, aura duré plus de trente années. Bérengère s’éteint peu avant Noel 1230. Son tombeau se trouve aujourd’hui dans la salle capitulaire de l’abbaye de l’Épau.