Le Mans-Grande Rue

C’est en 1777 que Mathieu Chesneau des Portes, Conseiller au Présidial, fit l’acquisition de cet Hôtel particulier, construit en 1581, qui porte maintenant le numéro 108 de la Grande Rue.
Comme le dit M. André Bouton (
La Vie pittoresque du Mans au temps des carrosses et des Chandelles) :

« Il aménagea l’Hôtel Aubert de Clairaulnay dans le goût du XVIIIe », avec le dernier confort de l’époque.
C’est peut-être lui qui y fit installer un cadran solaire et plus particulièrement une méridienne de temps vrai, objet employé depuis longtemps sous cette forme et toujours à la mode. Celle-ci existait encore en 1860. Nous en trouvons trace sur la photo de la collection des Musées du Mans. Mais soyons prudents, comme l’était Monsieur André Bouton, en écrivant que
« selon la tradition elle aurait été tracée par Claude Chappe ».

Dans sa lettre du 10 mai 1991, que m’avait envoyée notre ancien collègue Monsieur Georges Camus, érudit et poète, ("Les Cadrans solaires de Paris, CNRS, édition 1993"), je retiendrai la très bonne interprétation :

Extrait de la photo des Musées du Mans

M- Aubert 1La méridienne antérieure dont les musées du Mans détiennent la photographie me paraît s’expliquer de la façon suivante :

La ligne de gauche donne le midi local vrai depuis le point du haut jusqu’au symbole du Cancer dessiné dans le bas, ce symbole est mal représenté et ressemble plutôt au nombre 69. Le point du haut remplace le symbole du capricorne, absent, représentant le solstice d’hiver.

La ligne de droite est plus longue car elle n’a qu’un rôle indicatif, celui d’indiquer aux habitants du Mans où se trouve le soleil quand il est midi à Paris. C’est pour faire cette liaison que les deux lignes sont reliées par le haut en dehors du solstice d’hiver.

Hypothèse : les deux lignes ne sont pas parallèles, elles formenM- Aubert 2t entre elles, au centre fictif du cadran un angle de l’ordre de 1°26’, l’écart entre Paris et le Mans étant de 8 minutes 32 secondes de temps.
                                            
Dessin Paul Deciron

Que de problèmes pour ce XVIII
e siècle dans la détermination de l’Heure. Depuis Louis XIV, il fallait, on l’a déjà dit, régler les pendules du Royaume « selon la marche du soleil ». La France vivait avec un temps variable tout au long de l’année. Mais les pendules et les montres que fabriquaient de savants horlogers devenaient irritantes, car elles n’étaient presque jamais d’accord avec l’heure du soleil, en plus elles étaient de plus en plus précises ! Tout ceci était gênant pour les gens qui avaient l’habitude de faire confiance au soleil, dans l’organisation de leur vie quotidienne. L’adaptation des populations françaises à un temps fictif, qui ne prenait plus comme seul repère le déplacement apparent du soleil, fut assez longue. Il est intéressant de trouver encore en 1926, dans un manuel destiné aux apprentis horlogers, une leçon sur la manière de confectionner une méridienne de temps moyen, où l’auteur ajoutait :
"il n’en est pas moins à désirer, pour l’utilité publique, que ces méridiennes se multiplient, parce qu’elles offriraient à chacun un moyen direct de régler les montres et les pendules, sans aucun calcul ni recours d’aucune table", prudence !

        Où était la vérité ? …
SOLEM QUIS DICERE FALSUM AUDEAT (Qui ose dire que le soleil se trompe)

On pouvait lire dans Le Mercure de France de 1738 "plusieurs horlogers se voyant exposés aux reproches de leurs pratiques qui prétendent que leurs montres ne sont pas justes parce qu’elles ne s’accordent pas avec un cadran solaire que chacun affectionne dans son quartier". Ce doute des acheteurs, sur la fiabilité des mécanismes,  va conduire des horlogers à fabriquer des pendules à temps vrai à l’aide d’une came, le cadran comportera deux aiguilles, l’une terminée par un soleil pour le temps vrai, l’autre normale pour le temps moyen (1760 à 1800) ! De même ils confectionneront des petites méridiennes, en métal émaillé ou en fonte, qu’ils poseront sur leur magasin afin que les clients puissent régler leurs montres.
La méridienne que nous voyons maintenant,
n’est évidemment pas de Claude Chappe, elle remplace celle qui existait avant 1860 et tient compte, avec un peu de retard, des réflexions que nous venons de faire sur l’adaptation au temps.

Haut de page  

Date de dernière mise à jour : 16/11/2021